FÉDÉRATION  
Install Magazine 1004 – septembre 2025

Journée d’étude de l’Atic sur les bâtiments intelligents et le génie climatique

La numérisation et l’IA sont omniprésentes dans l’actualité. Elles prennent également de plus en plus d’importance dans la construction. Pour mieux cerner la manière dont l’essor des installations intelligentes affectera la pratique du génie climatique, l’Atic, l’association des techniciens HVAC, a organisé une journée d’étude sur ce thème.

BACS et SRI

Comme dans beaucoup d’autres domaines, la réglementation européenne -et plus particulièrement la directive EPBD- est ici également déterminante. Cette directive impose notamment que les nouveaux bâtiments non résidentiels dotés d’une installation de plus de 290 kW (chauffage et refroidissement combinés) soient équipés d’un système d’automatisation, appelé Building Automation Control System (BACS). Celui-ci doit être capable de remplir trois fonctions essentielles : surveiller (contrôler et analyser la consommation d’énergie), tester (comparer les performances avec des bâtiments similaires), et enfin permettre la communication entre les différentes installations techniques du bâtiment. L’implémentation de cette directive est une compétence régionale. La région de Bruxelles a pris les devants en rendant ce système obligatoire pour les nouveaux bâtiments non résidentiels depuis le 1er janvier 2025. En Flandre, une telle obligation fait partie du CPE pour les bâtiments non résidentiels, qui sera introduit d’ici la fin 2025. Le secteur, de son côté, réclame une réglementation applicable. Cela ne sert en effet à rien d’imposer une réglementation complexe et coûteuse, si celle-ci ne permet pas de réaliser des économies notables dans la pratique.

La directive introduit par ailleurs le concept de Smart Readiness Indicator (SRI). Il s’agit d’une mesure de la capacité du bâtiment à adapter le fonctionnement des installations aux besoins des utilisateurs et à les optimiser pour une meilleure efficacité énergétique, le tout grâce à un système de contrôle intelligent. Le SRI définit 9 domaines techniques (chauffage, refroidissement, ECS, éclairage, enveloppe dynamique du bâtiment, électricité, recharge des véhicules électriques, gestion) et indique le score de chacun d’entre eux. Ces évaluations sont ensuite regroupées en une moyenne pondérée qui permet d’obtenir un score global. Le SRI a une fonction purement informative : il fournit en effet aux utilisateurs, aux propriétaires et aux autres acteurs un aperçu du caractère pérenne d’un bâtiment. Il peut également être utilisé pour identifier les points forts et les points faibles de celui-ci : un bâtiment peut par exemple obtenir un bon score dans le domaine HVAC, mais être à la traîne en matière d’infrastructure de recharge pour véhicules électriques. Plusieurs projets d’évaluation sont actuellement en cours en Europe, auxquels Buildwise participe également.

Jumeau numérique et contrôle prédictif

Les bâtiments modernes deviennent très complexes et comptent souvent des centaines de systèmes de régulation, de capteurs et d’autres points de données, sans parler de l’intégration de différentes technologies. Les systèmes numériques et l’intelligence artificielle peuvent dès lors fournir une solution permettant de tout maîtriser. Le jumeau numérique, associé à un contrôle prédictif, constitue une approche prometteuse. Un jumeau numérique est un modèle numérique dynamique d’un bâtiment, basé sur des données BIM, des données ‘as built’, des informations provenant des différents fabricants, etc. Ce modèle est ensuite utilisé pour reproduire le comportement du bâtiment et de ses installations.

Cela permet un contrôle prédictif, dans lequel la régulation évalue le comportement futur du bâtiment. L’exemple classique est celui d’une journée de printemps où il fait encore froid le matin, mais où le temps se réchauffe dans l’après-midi. Avec une régulation classique, le chauffage s’allume d’abord. Lorsque le soleil commence à briller, les besoins en chaleur diminuent, mais l’inertie thermique du bâtiment provoque alors une surchauffe. Rafraîchir le bâtiment peut dès lors s’avérer nécessaire au cours de l’après-midi. Ce qui n’est bien entendu pas efficace d’un point de vue énergétique. De son côté, une régulation prédictive, tiendra compte des gains solaires futurs, et coupera le chauffage suffisamment à temps pour éviter toute surchauffe.

Un jumeau numérique permet également de détecter des anomalies. Des fuites ou des capteurs défectueux peuvent ainsi par exemple être détectés. Cela offre également des possibilités en matière de maintenance prédictive, dans la mesure où les composants sont remplacés avant qu’ils ne tombent en panne. Le fonctionnement d’une installation peut également être optimisé. Il arrive en effet que certaines pièces aient des besoins de chauffage ou de refroidissement plus importants que d’autres, en raison de leur emplacement ou de conditions spécifiques. Dans une régulation classique, la courbe de chauffe de toute la zone est alors souvent ajustée jusqu’à ce que cette pièce soit suffisamment chauffée ou refroidie. Cela réduit l’efficacité de l’ensemble de l’installation. Avec un jumeau numérique, il est par contre possible de localiser précisément le problème et d’apporter une solution ciblée, en ajustant par ex. l’équilibrage hydraulique. Il existe déjà diverses solutions en ce sens sur le marché.

La question clé consiste, bien entendu, à savoir ce que ces systèmes apportent. En effet, dans un monde idéal, si l’installation est parfaitement conçue, parfaitement exécutée, parfaitement équilibrée et parfaitement exploitée et entretenue, la commande intelligente offre peu de valeur ajoutée : tout fonctionne simplement comme prévu. Or, nous savons tous que ce n’est jamais le cas. Plus l’écart entre la théorie et la pratique est grand, plus la valeur d’un système de gestion intelligent est importante. Du point de vue de l’utilisateur, un système intelligent constitue en quelque sorte l’assurance que le bâtiment fonctionnera correctement, indépendamment des défaillances ou des circonstances imprévues.

Le revers de la médaille

Toutefois, la numérisation a également un coût. La journée d’étude s’est ainsi achevée par un examen des différents impacts environnementaux de l’utilisation de l’IA. Il s’agit avant tout de la consommation électrique de tous les centres de données qui seront nécessaires pour les applications d’IA à grande échelle, mais aussi des matières premières telles que l’eau ou les terres rares. La numérisation génère de plus une montagne de déchets électroniques, qui sont généralement difficiles à recycler. La conclusion est donc que l’IA ne doit pas être considérée comme la panacée.

Par Alex Baumans

www.atic.be